Du 26 mai au 11 juin, la France met à l’honneur l’Amérique latine et les Caraïbes à travers la neuvième édition de la SALC, la Semaine de l’Amérique latine et les Caraïbes. Une occasion de célébrer les liens d’amitié et les intérêts partagés entre nos deux régions.
BRÉSIL
Depuis la destitution de la présidente Dilma Rousseff, l’image du pays-continent ne cesse de se dégrader. Quels ont-été les impacts de ces vagues successives de changements sur l’économie du pays ? Comment les relations économiques franco-brésiliennes ont évolué durant cette période ? Comment les entreprises françaises ont-elles réagi sur place ?
Et maintenant ? Quelles sont les perspectives et les marchés porteurs pour les entreprises françaises sur place mais aussi pour celles qui souhaitent pénétrer ce marché ?
Expansio décrypte les enjeux pour les entreprises françaises et partage les conseils pratiques de nos partenaires SALC22 interviewés pour l’occasion : Bpifrance, Western Union Business Solutions et la CCI France-Brésil.
Regards croisés par Benjamin EGOT, Responsable du développement commercial d’Expansio et fondateur de l’Observatoire Économique France-Ceará.
Avec :
Patrick SABATIER – Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Brésil, Chief Corporate Affairs Officer de L’Oréal au Brésil,Président du Lycée français de la ville de Rio de Janeiro et Membre du Conseil de la ville de Rio de Janeiro.
Guillaume DEJEAN, Stratégiste Taux de Change – Western Union Business Solutions.
et Alban d’Herbès, Directeur Régional pour l’Amérique latine – Bpifrance
La synthèse des échanges en vidéo (15′):
L’intégralité des interviews ci-dessous :
3 questions à Patrick SABATIER, Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Brésil, Chief Corporate Affairs Officer de L’Oréal au Brésil,Président du Lycée français de la ville de Rio de Janeiro et Membre du Conseil de la ville de Rio de Janeiro :
- Pourriez-vous nous présenter les activités de la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Brésil ?
La CCIFB est présente au Brésil depuis plus de 120 ans. Il existe au Brésil près de 1 000 entreprises françaises implantées employant plus de 470 000 collaborateurs*. La France est le 3ème investisseur étranger au Brésil avec 40 Mds de USD investis. Quasiment toutes les entreprises du CAC 40 sont présentes.
Mais il y a aussi pléthore de petites et moyennes entreprises. Fait peu connu du grand public le plus grand employeur au Brésil est un groupe français, Carrefour !
La CCIFB est insérée dans le dispositif de l’équipe de France au Brésil.
L’ambassade de France à Brasilia avec des consulats à São Paulo, Rio de Janeiro et Recife et ses équipes du service économique régional, Business France, l’Agence Française de Développement (AFD et Proparco), Atout France, la section des Conseillers du Commerce Extérieur de la France participent de ce dispositif exceptionnel qui accompagne nos entreprises dans chaque étape de leur implantation au Brésil. La CCIFB, de façon absolument complémentaire avec ces autres acteurs, est en charge de la promotion du développement des relations économiques, financières, commerciales, industrielles, scientifiques et culturelles, entre la France et le Brésil. Elle est précieuse pour les entreprises qui ont choisi d’investir au Brésil. Présente via 4 régionales à São Paulo, Rio de Janeiro, dans le Minas Gerais et le Paraná** elle a 2 vocations, encore plus à l’heure du virtuel, d’accompagner des entreprises à travers ce pays-continent. Le plan stratégique en cours de finalisation contemple clairement cette dimension.
- Quels sont les points d’attractivités au Brésil pour nos entreprises françaises ?
Au-delà des éléments macro partagés sur la présence française au Brésil, on peut observer de très nombreuses opportunités pour nos entreprises. A commencer par la technologie et l’innovation ! La French Tech regroupe près de 120 sociétés startups françaises présentes au Brésil ou startups brésiliennes créées par des Français ou des Brésiliens ayant étudiés en France.
FinTech, E-commerce & market place, marketing ou logistique et transport pour ne citer que ces secteurs qui comptent parmi elles quelques licornes.
Mais la France est également très présente par exemple en matière d’énergie (notamment verte !), de développement durable d’infrastructures, de smart city, d’assurances de distribution, tourisme, beauté, pharmaceutique, automobile ou chimie.Partout où l’excellence française a fait ses preuves nos entreprises connaissent des success stories au Brésil.
- Quelle est votre vision de l’avenir pour l’investissement français au Brésil compte tenu des prochaines échéances électorales ?
« Le Brésil n’est pas un pays pour débutants » disait le poète Tom Jobim.
Ce pays béni des dieux a un sous-sol d’une extraordinaire richesse complétée au cours des dernières décennies par la découverte de pétrole offshore. Il a aussi une matrice énergétique et écologique unique au monde entre hydraulique, éolien et solaire.
Malgré des enjeux de préservation, le Brésil abrite aussi la plus grande biodiversité de la planète avec une végétation native préservée occupant plus de la moitié de son territoire.
Ce pays continent, plus que l’Union Européenne, a également touristique marché intérieur de plus de 200M d’habitants.
Enfin, c’est une démocratie ou le jeu des pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire et médias) joue beaucoup.
Bien entendu, le Brésil a connu notamment au cours de la dernière décennie son lot de crises économique, morale, sociale, sanitaire voire politique. Mais dans ce pays latin, judeo-chétien, démocratique, la complexité se cache souvent derrière les apparentes similitudes.
Pedro Malaw, l’ex-ministre de l’Economie et des Finances de Fernando Henrique Cardoso, a su rappeler en son temps qu’au Brésil, même le passé est incertain. Et ce qui est certain c’est qu’il faut pour comprendre et appréhender ce pays regarder le film et non pas une photo instantanée.
Dans un monde VUCA qui traverse après la crise du Covid une crise internationale d’une ampleur inconnue depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, dans un monde où des millions d’habitants sont contraints à quitter leur foyer en Ukraine et où des millions d’habitants sont assignés à résidence en Chine, le Brésil peut apparaître, et pas seulement pour les commodities, comme un « porto seguro » ou du moins une région qui devrait attirer l’attention des entreprises françaises soucieuses d’internationaliser ou de diversifier leurs investissements.
(*) 2ème plus grande présence française à l’étranger.
(**) Régions historiques de présence d’entreprises françaises.
5 Questions à Guillaume DEJEAN, Stratégiste Taux de Change – Western Union Business Solutions.
- Quels étaient les marchés porteurs au Brésil il y a 10 ans ?
L’économie brésilienne était déjà en 2010 une économie très centrée sur les services, notamment financiers, avec néanmoins un important secteur industriel porté par l’automobile, la construction ou encore la métallurgie qui contribuait à plus de 23% du PIB. Une décennie plus tard, on observe une forte désindustrialisation de la 1ière économie d’Amérique Latine avec une contribution de secteur désormais inférieure à 18% du PIB. À l’image des pays développés, les services ont pris une part de plus en plus importante dans l’économie brésilienne et contribue désormais à près de 63% à la production de richesse, soit parmi le plus haut taux du continent sud-américain avec celui de l’Uruguay (63%).
Source : Organisation de développement industriel des Nations Unies.
- Comment ont-ils évolué au cours de ces différents épisodes ?
Au sein de l’industrie on observe plusieurs dynamiques sur ces 10 dernières années. Si le secteur de l’agro-alimentaire reste la plus importante en matière de valeur ajoutée créée, elle voit sa part dans le revenu total augmenter significativement de 16% à 20%. Même constat pour l’industrie chimique qui voit sa part dans la valeur ajoutée générée par l’industrie progresser de 10% à 14% entre 2009 et 2019. L’industrie minière (de 6% à 7%) et celle du papier (de 4% à 5%) ont légèrement elle-aussi progressé au cours de la dernière décennie. À l’inverse, l’industrie automobile (contribution du secteur des véhicules motorisés et semi-remorques réduite de 11% à 7% en 10 ans) et l’industrie de cokéfaction & raffinage de produits pétroliers (réduction de 14% à 11%) ont toutes les deux vu leur poids dans l’économie brésilienne se réduire.
Comme un symbole de cette perte de vitesse de l’automobile au Brésil, l’entreprise américaine Ford a annoncé en janvier 2021 la fermeture de ses trois dernières usines où elle était installée depuis 1921. La pandémie a forcé les secteurs les plus sinistrés comme l’automobile de revoir leurs plans stratégiques et de faire des coupes budgétaires dans les domaines et/ou endroits où la productivité est la moins élevée. La production automobile a chuté en 2020 à son niveau de 2010 et peine depuis à se redresser. La perte de vitesse de ce secteur s’observe également sur l’emploi puisque selon les statistiques nationales l’automobile représentait 135 000 emplois en 2013 contre seulement 107 000 en 2019 (-21%).
Remarque : selon le président du syndicat des travailleurs du secteur de la métallurgie dans la région de Sao Bernardo, le Brésil était à la fin des années 80 la 6ième économie industrielle mondiale, elle n’est plus que la 12ième aujourd’hui.
Source : Organisation de développement industriel des Nations Unies.
En matière d’Investissement Direct à l’Etranger (IDE) des entreprises françaises au Brésil au cours des 10 dernières années (période 2009-2019 observée), on observe plusieurs tendances :
- Domination stable du secteur financier qui demeure le premier capteur d’IDE français.
- Présence très forte d’activité de holdings qui vient de la structure du marché brésilien qui oblige pour un investisseur étranger d’avoir une filiale, joint-venture ou partenariat avec une entreprise locale.
- Le secteur de l’extraction (pétrole et gaz) était en 2019 le second secteur dans lequel les entreprises ont le plus investi. La raréfaction et l’importance cruciale de ces énergies minières dans l’économie mondiale suscitent toujours d’importants intérêt.
- Forte progression des IDE dans la distribution et les secteurs liés à la consommation puisque le Brésil a la 6ième plus grande population mondiale (plus de 210 Mln hab.). Un symbole de ces investissements est Carrefour qui aujourd’hui réalise 20% de son CA au Brésil.
- Forte progression dans le secteur des services publics tels que l’électricité, le gaz et l’eau. Le manque d’infrastructures dans le pays eu égard à sa population ouvre des marchés pour des entreprises étrangères.
- L’industrie de la chimie voit son stock d’IDE multiplié par 2 entre 2009 et 2019. Le développement d’engrais pour accroître la productivité des semences agricoles, ou encore les développements réalisés dans les biocarburants ont grandement participé à l’essor de l’industrie chimique dans le pays.
- Les industries de la restauration ou encore d’édition (films, médias, …) rencontrent moins de succès en partie en raison des spécificités du marché brésilien et de sa rigidité.
- 1er producteur en Amérique Latine et 11ième dans le monde, l’automobile garde une place stratégique au Brésil pour les constructeurs français (en raison de la taille du marché local). Les entreprises françaises comme PSA et Citroën y sont bien implantées après une arrivée tardive sur ce marché (2000 pour PSA).
- La construction via l’ingénierie et l’architecture demeure un secteur dans lequel les entreprises françaises ont investi au cours des dix dernières années. L’urbanisation du pays a grandement contribué à cette tendance.
- Le secteur des assurances figure à la 7ième place du top 10 des secteurs avec le plus de stocks d’IDE français. Là encore, les opportunités découlent d’une population très nombreuse et d’une offre locale réduite.
Source : Banque de France
- Quels sont les marchés porteurs aujourd’hui ?
Les secteurs phares de demain : reconstruire sa politique énergétique via des sources renouvelables. Le Brésil est très – voire trop dépendant – de l’hydroélectricité dans son mix énergétique puisque celle-ci représentait près de 66% de l’électricité générée dans le pays en 2020. Un chiffre en baisse par rapport aux années 2000 mais toujours très haut, ce qui expose le pays à des risques de pénurie lors d’épisodes de sécheresse extrême comme celle observée à l’été 2021. Or à cause des dérèglements climatiques, il est possible d’observer dans le futur plus de phénomènes de ce genre, ce qui pousse donc le Brésil à revoir sa stratégie énergétique et donc investir davantage dans les autres énergies renouvelables comme le solaire, l’éolien, la biomasse.
Si le pétrole occupe encore une large place au Brésil (40%), en 2019 près de 50% de l’énergie au Brésil provenait de sources renouvelables contre 39% en 2014 (source : Our Wolrd in Data, BBC).
Exemple (1) : le producteur français indépendant Qair a levé en février 44 Mln€ sous forme d’obligations vertes pour financer ses projets de développement éolien et solaire (600 MW) au Brésil et en Europe.
Exemples (2) : En février, le Brésil vient de lancer un projet d’éolien offshore qui vise à produire 20x la production mondiale actuelle (700 MW).
Les secteurs phares de demain : participer à nourrir le monde via une agriculture performante. Bien qu’il occupe une faible portion du PIB national, le secteur agricole a un rôle clé au Brésil, car en plus de nourrir une population très dense (plus de 200 Mln hab.), il contribue par ailleurs à alimenter le monde, et notamment la Chine via sa production de soja dont l’économie sud-américaine est l’un des plus gros producteurs dans le monde avec les Etats-Unis. L’agro-alimentaire (céréales, légumes, produits transformés et animaux) représentait en cumulé la plus large contribution des exportations brésiliennes (près de 40%) et donc une part de revenu clé pour le pays. Dans la mesure où les projections mondiales indiquent que la population devrait atteindre près de 10 Mds d’habitants d’ici 2050, plusieurs entreprises dans le secteur de l’agro-business, mais aussi de la chimie, investissent massivement pour développer de nouvelles semences plus résilientes et plus productives. Des « cross-over » sont également réalisés entre l’agriculture et le secteur de l’énergie pour produire des biocarburants non polluants.
Source : OEC.
- Quel impact ont eu ces fluctuations sur les investissements français au Brésil ?
Ce ne sont pas tant les fluctuations de la devise que l’état de santé de l’économie brésilienne qui a influencé les flux d’IDE français à l’étranger. Si cela ne se vérifie pas à chaque fois, on observe néanmoins une certaine corrélation entre le flux d’IDE et la croissance du PIB brésilien. Lorsque l’économie va mal – ce qui donne lieu très souvent à une dépréciation de la devise locale – les investisseurs n’ont pas tendance à placer son argent ou lancer des projets de long terme dans le pays. Cela est notamment notable sur la période 2014-2015 durant laquelle le Brésil a subi une lourde récession ou encore en 2020 durant la période de pandémie.
La volatilité de la devise est souvent signe d’instabilité économique, politique et/ou financière. Aussi il est vrai qu’elle peut servir de baromètre pour une entreprise pour évaluer si l’environnement est propice aux investissements ou non. L’évolution du réal brésilien est très corrélée au risque souverain associé au pays.
Source : Trésor français.
Pour les industries sur place, la forte de dépréciation de la devise peut poser des problématiques en matière de coût de production si les besoins d’intrant sont importants. Notons toutefois que la particularité du Brésil est que le pays dispose de beaucoup de ressources naturelles, aussi bien du pétrole que des produits miniers ou agricoles, aussi c’est une des raisons pour lesquelles le Brésil est moins impactés que d’autres pays par des problématiques d’approvisionnement, ce qui pousse aussi de nombreux industriels français à choisir le Brésil comme destination.
Source : Banque de France.
L’aspect économique et politique est d’autant plus important pour une entreprise qui souhaite s’installer et se développer au Brésil car le processus d’implantation au Brésil n’est pas simple. Malgré des améliorations notables récentes, notamment en matière de lancement d’entreprises et de fiscalité, il est important de noter que le Brésil n’est pas un marché simple dans lequel se lancer lorsque l’on est une entreprise étrangère. C’est du moins ce que souligne l’indicateur de la Banque Mondiale mesurant la facilité des faire des affaires. En 2020, le Brésil se classait 124ième de ce classement qui compte 190 pays listés, soit un résultat peu glorieux pour la 12ième économie mondiale.
Parmi les axes d’amélioration notables, on relève la fiscalité, la facilité d’obtention de permis de construire, les procédures administratives pour créer une société et pour enregistrer un bien immobilier. La vétusté des infrastructures illustrées par l’indice mesurant la facilité d’accès à l’électricité mais aussi l’accès au crédit sont aussi des freins pour une entreprise étrangère qui souhaite se développer au Brésil.
Remarque : Le Brésil compte 92 impôts, taxes et contributions sociales qui sont régis par des règles très spécifiques, ce qui implique une grande complexité et des démarches administratives longues et coûteuses pour une entreprise (perte de productivité indue). Selon l’OCDE, les entreprises au Brésil consacrent 1958 heures à payer leurs impôts contre 159 heures en moyenne au sein des pays de l’OCDE.
- Quels seraient les impacts d’une réélection de M. Bolsonaro ou d’un retour de M. Lula au pouvoir pour les entreprises françaises déjà sur place ou qui voudraient s’y développer ?
1/ Si victoire de Bolsonaro : maintien de réformes libérales et favorables aux entreprises, mais aussi risque d’isolement sur la scène internationale et probablement continuité de la dynamique de déforestation de la forêt amazonienne (+22% entre août 2020 et juillet 2021 et une zone de déboisement qui dépasse les 13 000km2 pour la 1ère fois depuis 15 ans) qui s’est accélérée sous la présidence de Bolsonaro pour soutenir le secteur minier et celui d’élevage de bétails. Cela pourrait avoir des conséquences notable sur l’écosystème brésilien à moyen/long terme, et notamment accentuer le nombre de catastrophes environnementales dans le pays.
Les milieux des affaires et la bourse ont plutôt apprécié le mandat de J. Bolsonaro puisque malgré la pandémie l’indice de la bourse de Sao Paulo enregistre un rebond de près de +20% entre fin 2018 et aujourd’hui.
On peut s’attendre également à une politique budgétaire plus stricte après les écarts enregistrés durant la pandémie (déficit public de -13,3% du PIB en 2020). La dette brésilienne a néanmoins déjà considérablement reculé et était en avril inférieur à 80% du PIB (78,5%), soit son plus bas niveau depuis avril 2020.
Au regard du poids de l’inflation sur le pouvoir d’achat des ménages, Bolsonaro prévoit un nouveau programme d’aide aux plus démunis de 30 Mds$. Certains y voient une décision populiste destinée à conquérir les électeurs les plus pauvres et ainsi rattraper son retard dans les sondages sur son principal concurrent Lula.
2/ Si victoire de Lula: celui-ci n’a pas dessiné encore de programmes spécifiques aux entreprises néanmoins ce dernier a une approche opposée à Bolsonaro et est partisan d’une répartition des richesses, d’une plus grande rigidité des protections des travailleurs et de l’économie. On peut s’attendre à une large augmentation des dépenses en santé, éducation et divers programmes d’aides sociales s’il arrivait au pouvoir. Cela pourrait s’entreprendre via une hausse des dépenses publiques (et donc des déficits) mais aussi possiblement une hausse des impôts (sur les plus hauts revenus et possiblement sur les sociétés).
Lula a particulièrement fait part de son envie de régulariser davantage l’ubérisation de l’économie (Gig Economy) qui est ces dernières années le plus gros créateur d’emploi dans le pays.
L’arrivée d’une personnalité de gauche et la perspective d’un possible dérapage des dépenses publiques et/ou durcissement de la régulation et taxation des entreprises pourraient avoir des répercussions négatives sur les investissements étrangers.
8 questions à Alban d’Herbès, Directeur Régional pour l’Amérique latine – Bpifrance.
- Quelles sont les actions menées par Bpifrance en Amérique latine ?
Chez Bpifrance, notre mission est d’aider les entreprises françaises à se développer à l’international. En Amérique latine, nous couvrons 23 pays.
L’ouverture du bureau de Mexico ayant compétence sur l’Amérique Latine et les Caraïbes en septembre 2019 marque un tournant dans l’aventure internationale de Bpifrance.
Nous représentons l’ensemble des activités de Bpifrance, le financement avec principalement le crédit export, l’investissement ainsi que les garanties publiques dont les engagements sur la zone sont importants et nombreux.Nos missions sont très variées, l’accompagnement de nos clients français est la principale.Nous sommes très impliqués dans les relations avec nos partenaires français et étrangers.
Nouer des partenariats, connecter les écosystèmes sont des activités primordiales. Nous sommes aujourd’hui proche de nos principaux homologues de la région et lançons de grandes réflexions.
Terre vierge de crédit export Bpifrance, nous avons signé en 2020 les premiers contrats finançant des ventes de biens français à des entreprises brésiliennes, péruviennes et mexicaines.
Nous avons ainsi placé l’Amérique Latine sur les cartes françaises et nous continuons inlassablement à vanter son potentiel industriel et de production, son marché intérieur gigantesque, ses opportunités et ses richesses naturelles et humaines.
En 2021 la région est devenue la deuxième zone de financement de Bpifrance le potentiel de la région est confirmé mais le chemin reste long et le travail passionnant.
- Quel est votre rôle sur place ?
Bpifrance a une vision précise et large des différentes opportunités sur zone. En effet, nous sommes proches des institutions privées et publiques, des décideurs, des chefs d’entreprises, de tous ceux qui font l’Amérique Latine de demain.
Bpifrance s’efforce de connecter les différents environnements et permet ainsi aux entreprises françaises de bénéficier d’un socle d’information complet.
Le travail en équipe est un facteur essentiel de la réussite de tous, cette équipe en Amérique Latine peut se vanter de fonctionner en parfaite cohésion et ainsi adresser un message lisible à nos exportateurs en recherche d’informations, de relai et de soutien.
- Quels conseils pour les entreprises souhaitant prospecter le marché ?
Dans les prochaines années, le pays devrait devenir la 5e puissance économique mondiale. Totalement réceptif aux étrangers, il est y facile de se créer un espace et développer son entreprise.
Les deux conseils que je donne sont :
- Soyez accompagnés : les partenaires sont nombreux, ils connaissent le pays et ses acteurs. Le Brésil est un pays complexe qui nécessite un accompagnement.
- Investissez : une stratégie ambitieuse nécessite de l’investissement.
- Quel est l’écosystème de Bpifrance au Brésil ?
Le Brésil est considéré par les équipes de Bpifrance comme un pays prioritaire pour 2022. Nos équipes ont déjà signé des dossiers de crédit export sur la zone et un déplacement est prévu pour échanger avec les acteurs publics et privés clés à la fin de l’année.
En effet, le Brésil possède d’abondantes ressources naturelles et une économie relativement diversifiée. Avec plus de 600 entreprises françaises employant plus de 500 000 brésiliens, le pays est le premier producteur mondial de café, de canne à sucre et d’oranges, et l’un des plus grands producteurs mondiaux de soja. Le pays attire également de nombreux groupes multinationaux dans les industries de l’alimentation et des biocarburants. Il est, en outre, notre premier partenaire commercial en Amérique latine et la deuxième destination des investissements français parmi les pays émergents en termes de stock, au coude-à-coude avec la Chine.
- Quelles sont les ambitions stratégiques de Bpifrance sur le volet de l’export d’ici 2023 pour l’AMLAT ?
Bpifrance désire accentuer son action sur zone en maintenant la croissance de son activité.
La zone est en pleine croissance, des opportunités sont nées et nous souhaitons que nos entreprises les transforment. Les entreprises latinos sont demandeuses d’échanges et de partenariats. Beaucoup de pays transforment leur outil industriel et sont en recherche de nouveaux process et de nouvelles technologies.
- Comment anticiper les bouleversements politique de la zone (exemple du Brésil) ?
Nous proposons une gamme de produits large qui permet aux entreprises de se couvrir sur les risques rencontrés dans leur développement à l’international. L’assurance-crédit permet ainsi de favoriser les exportations françaises en couvrant les différents risques à l’export. Elle est ainsi destinée aux exportateurs français de toute taille, pour toute la durée de leur contrat, de l’appel d’offre au dernier paiement et couvre les risques politiques et commerciaux. L’assurance prospection les accompagne sur les risques de coûts liés à la prospection et dernier exemple l’assurance change leur permet de rendre des propositions commerciales en devises étrangères. Ce dernier sujet est particulièrement important dans la zone qui a vécu des variations très importantes ces derniers mois.
- Comment rattraper le décrochage suite à la crise sanitaire ?
L’export fait partie des grands axes des ambitions stratégiques 2021-2024 de Bpifrance.
Avec la crise sanitaire, les pays ont dû faire face aux nouvelles contraintes du commerce international. En France, aux côtés de la Team France Export, Bpifrance a déployé un plan de relance du commerce extérieur, le plan Relance Export, pour accompagner l’internationalisation des entreprises.
Bpifrance, en tant que pilier financement de la Team France Export (TFE), élargit sa gamme de financement export d’ici à 2024.
Le crédit export, consacré en priorité aux PME et ETI, sera en effet complété d’une nouvelle offre de financement de projets adossé à la garantie publique. Ce nouveau dispositif compensera le défaut de solutions disponibles sur le marché rencontré par les entreprises françaises.
- Plus généralement, pensez-vous qu’il va y avoir un regain de l’export dans les prochains mois ?
Les entreprises ont inclus les risques liés à la covid-19 dans leur stratégie internationale. Les différents outils proposés aussi bien par le public que le privé permettent d’amortir ces risques.
Les exportations françaises représentent 30 % de notre PIB et 6 millions d’emplois directs ou indirects, soit un quart de la population active, dépendent l’accompagnement des entreprises françaises à l’international.
Nous sentons une envie forte chez nos exportateurs, a nous de leur donner la confiance pour y aller. Notre message est clair : foncez et nous vous suivrons !
Faites nous part de vos projets, échangeons. Bpifrance est à votre disposition et fera tout pour vous faire gagner.
24 informations que vous ne connaissiez peut-être pas sur la France, l’Amérique latine et les Caraïbes :
1. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les trois quarts des comités de la France libre créés dans le monde l’ont été en Amérique latine et dans les Caraïbes.
2. La France partage sa plus longue frontière terrestre avec le Brésil (plus de 700km).
3. Les principaux héros des indépendances latino-américaines ont tous leur statue à Paris : Bolivar, Miranda, San Martin, Artigas, Caballero et Marti.
4. Francisco de Miranda (1750-1816), le « Précurseur » des indépendances latino-américaines, était général de l’armée française, a participé à la bataille de Valmy et est honoré sur l’Arc de Triomphe comme un héros de la Révolution française.
5. La France est le 1er pays à reconnaitre l’indépendance de l’Uruguay en 1825. A la fin du XIXe siècle, près du tiers de la population d’Uruguay est française ou d’origine française. Les Français représentaient 40% des habitants de Montevideo en 1850, et 15% des Uruguayens ont aujourd’hui des origines françaises.
6. Huit États d’Amérique latine et des Caraïbes ont rejoint l’organisation internationale de la Francophonie en tant que membres à part entière ou observateurs : le Costa Rica, la Dominique, Haïti, le Mexique, la République dominicaine, Sainte-Lucie, l’Uruguay et l’Argentine.
7. Salvador Allende (1908-1973) est, après Jacques Brel, la personnalité étrangère en l’honneur de laquelle ont été nommées le plus grand nombre de voies (577 boulevards, rues, allées ou places) en France.
8. À la fin du XIXème siècle, la franco-péruvienne Flora Célestine Thérèse Henriette Tristán y Moscoso (1803-1844), plus connue sous le nom de Flora Tristan, est devenue l’une des figures emblématiques de la classe ouvrière et de la condition féminine à travers le monde. Plusieurs lieux lui rendent hommage à Bordeaux, où elle est décédée en 1844.
9. Les écrivains Gabriel Garcia Marquez, Mario Vargas Llosa, Octavio Paz et le peintre Fernando Botero ont vécu à Paris.10. L’Amérique latine a vu naitre plusieurs écrivains français de renom. Isidore Ducasse, ou Comte de Lautréamont, Jules Laforgue et Jules Supervielle sont nés à Montevidéo, la capitale de l’Uruguay tandis que Joseph Kessel à lui vu le jour à Buenos Aires.
10. C’est son amitié avec le poète et écrivain français André Breton, qu’elle rencontra en 1938 à Mexico alors qu’il y était envoyé par le Ministère des Affaires étrangères, qui permit à la peintre et artiste Madgalena Frida Carmen Kahlo Calderón (Frida Kahlo) de traverser l’Atlantique pour rejoindre la grande exposition sur le Mexique à la Galerie Renou et Pierre Colle.
11. Le peintre impressionniste franco-danois Camille Pissarro (1830 – 1903) est né sur l’île de Saint-Thomas (aujourd’hui dans les îles Vierges des États-Unis) et a vécu à Caracas. Ainsi, son œuvre comporte aussi bien des paysages des Caraïbes que de la campagne de Normandie ou d’Ile-de-France.
12. L’actrice Bérénice Bejo est née à Buenos Aires et possède la double nationalité franco-argentine.
13. L’écrivain argentin Julio Cortázar (1914-1984), naturalisé français par le Président Mitterrand, est inhumé au cimetière du Montparnasse à Paris.
14. Le prix Nobel de littérature guatémaltèque Miguel Angel Asturias, décédé à Madrid en 1974, avait expressément demandé à être inhumé à Paris. Il repose au cimetière du Père Lachaise, sous une stèle d’inspiration maya.
15. Deux des plus grands écrivains latino-américains étaient ambassadeurs à Paris lorsqu’ils reçurent le prix Nobel de littérature : Miguel Angel Asturias en 1967 alors ambassadeur du Guatemala et Pablo Neruda ambassadeur du Chili en 1970.
16. C’est un joueur français, Lucien Laurent, qui a marqué le premier but de la première Coupe du monde de football. C’était au cours du match France-Mexique le 13 juillet 1930 à Montevideo.
17. Le naturaliste et botaniste français Aimé Bonpland (1773-1858) a mis au point la technique de culture du maté, boisson traditionnelle sud-américaine.
18. Le paysagiste français Charles Thays (1849-1934), a conçu et dessiné nombre de parcs et jardins de Buenos Aires, dont le Jardin botanique et le Bois de Palermo. La physionomie de la capitale argentine et de plusieurs autres villes lui doit beaucoup.
19. Papillon, autobiographie romancée d’Henri Charrière publiée en 1969, raconte ses évasions du bagne de Cayenne en Guyane française puis sa cavale en Colombie et au Venezuela. Très grand succès d’édition avec plus de 10 millions d’exemplaires vendus, le livre est également adapté plusieurs fois au cinéma.
20. Écrivaine francophile et mécène argentine, Victoria Ocampo (1890-1979) a contribué durant près d’un demi-siècle au rapprochement des littératures de France et d’Argentine, publiant des auteurs tels qu’André Malraux et Roger Caillois dans sa revue et maison d’édition « Sur », crées en 1931 et 1933.
21. Le 8 mars 2021, place de la République Dominicaine à Paris, a été inaugurée une plaque commémorative en l’honneur des sœurs Mirabal, célèbres résistantes assassinées sous la dictature de Trujillo, le 25 novembre 1960. En 1999, l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies a proclamé le 25 novembre Journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes, en l’honneur des sœurs « Mariposas ».
22. En 2021, le chef d’orchestre vénézuélien Gustavo Dudamel a été nommé Directeur musical de l’Opéra de Paris pour six ans. Il s’agit du premier latino-américain à occuper ce poste. Gustavo Dudamel est devenu célèbre en dirigeant l’orchestre symphonique Simon Bolivar, surnommé El Sistema, un orchestre fondé durant les années 1970 pour émanciper les jeunes vénézuéliens par la pratique de la musique.
23. Deux Français ont participé à la construction de la statue du Christ Rédempteur, à Rio de Janeiro au Brésil. Le sculpteur Paul Landowski a dirigé les travaux et l’ingénieur Albert Caquot s’est occupé de la structure en béton armé.
24. Hercule Florence (1804-1879), un Franco-monégasque émigré au Brésil, y a été l’un des précurseurs méconnus de la photographie. Explorateur et inventeur, il s’est intéressé au chant des animaux et a conçu différents procédés d’impression.

Découvrir la richesse créative de la région
La programmation 2022 s’appuie sur les initiatives des ambassades des pays d’Amérique latine et des Caraïbes en France, d’associations, d’établissements d’enseignement et de recherche, de musées ou encore de galeries d’art.
De Cherbourg-en-Cotentin à Montpellier en passant par Bordeaux, de Paris à Lima, de Toulouse à Mexico, la Semaine offre au public un large panorama de la créativité latino-américaine et caribéenne en France et de l’intérêt des Français pour cette région.
Plus de 300 événements sont organisés par presque autant de partenaires :
- projections de films,
- colloques,
- concerts,
- spectacles de danse,
- artisanat, dégustations, expositions, rencontres littéraires…
À Bordeaux, une cinquantaine d’événements célébreront les quatre coins de l’Amérique latine et des Caraïbes à travers des spectacles, des conférences, des ateliers ou encore des expositions. A Mulhouse, le festival « Le Printemps du Tango » mettra en vedette cette danse emblématique de la latinité, tandis que les civilisations préhispaniques seront mises à l’honneur au musée des Amériques à Auch. Depuis Paris, l’Institut des Amériques fera débattre un large éventail de spécialistes autour des thèmes de l’éducation, du numérique, de la cohésion sociale et des politiques publiques en Amérique latine, dans les Caraïbes et en Europe, lors de son colloque international organisé avec le soutien de l’Agence française de développement et la Fondation EU-LAC.
SALC 2022 : découvrez l’ensemble de la programmation
Des rencontres politiques et économiques
Cette édition 2022 sera aussi marquée par des rencontres politiques et économiques pour penser la relation entre l’Amérique latine, les Caraïbes et la France, mettre en valeur les partenariats et renforcer les synergies face aux défis actuels.
Ainsi, le Forum économique international de l’Amérique latine et des Caraïbes organisé par le Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la Banque Interaméricaine de Développement (BID) et l’Agence française de développement (AFD), et le Forum d’affaires « Ambition Amérique latine » organisé par Business France, sous l’égide des ministères de l’Europe et des Affaires étrangères et de l’Économie, des Finances et de la Relance, réuniront des participants latino-américains et français de haut niveau.
Une initiative qui s’inscrit dans la durée
En 2011, la « Journée de l’Amérique latine et des Caraïbes » est lancée, à l’initiative du Sénat, afin de célébrer et renforcer les liens entre les pays de cette région et la France.
En 2014, la « Journée » devient une « Semaine », organisée et coordonnée par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.
Au fil de ses éditions, la Semaine est devenue tour-à-tour savante, populaire ou festive, mais toujours incontournable, à Paris comme dans toute la France. Elle s’est imposée comme un moment fort de rencontres et de réflexions partagées entre l’Amérique latine, les Caraïbes et la France.
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